Un exemple de séances avec une personne en fin de vie
Isabelle Courrier, facilitante
Cela faisait plusieurs jours, qu’Anaëlle (prénom d’emprunt) ne parlait que par un mot à la fois et quelques hochements de tête, quand elle se réveillait de son long sommeil profond. Plusieurs personnes autour d’elle disaient : « Elle a encore quelque chose à dire, elle a encore quelque chose à nous dire ! », tant Anaëlle s’accrochait à la vie.
C’est à ce moment-là que j’ai proposé la communication en facilitation aux personnes l’entourant. Voici comment je me suis prêtée à la séance :
La famille proche devant rentrer chez elle, chacun vint lui dire au revoir. Anaëlle, qui dormait depuis plus de 8 heures, se réveille, très consciente, et souhaite rester un moment seule avec sa mère.
Quelques minutes plus tard on vient me chercher. Je propose la communication en facilitation, et après explication, Anaëlle accepte d’un hochement de tête. Sa mère à ses cotés, Anaëlle est prête, sa main est lourde, sans aucun tonus. Je sens une impulsion et… les mots s’écrivent.
A la fin du message, j’offre la possibilité de le lire à haute voix. Quand je lui demande : « C’est bien ce que tu voulais dire ? », Anaëlle acquiesce d’un hochement de tête et même de 2-3 sourires suivant le contenu. Sa mère prend le message avec émotion.
Puis, Anaëlle appelle d’une voix faible une à une les personnes présentes. Devant chacune, elle écrit sur le clavier. Entre les temps de changement de personne, elle bouge avec impatience son doigt pointé sur l’ordinateur et trouve la force de dire : « Encore, je vais mourir ».
Pendant une heure, elle a écrit, demandant à certaines personnes de revenir, et elle a même tapé un message pour une personne absente.
Pendant une heure elle a écrit, elle a écrit… des messages très personnels et émouvants, puis la fatigue l’envahissant, la séance a dû s’arrêter.
Anaëlle s’est endormie, épuisée. Vingt quatre heures après ses derniers mots et sans s’être réveillée, Anaëlle s’en est allée paisiblement, comme elle le souhaitait tant, sans angoisse, sans crispation, sans suffocation.
Anaëlle connaissait vaguement la communication en facilitation qu’elle avait rencontrée au sein de son travail, mais sans y adhérer.
Elle a eu ces mots pour moi :
Tu as donné une lumière à chacun, merci …, merci de m’avoir donné les mots pour tous.
Les parents, les amis m’ont exprimé : « Merci, de nous avoir permis encore un échange très émouvant avec elle. Elle avait tellement cette envie, ce besoin de nous parler. »
Le personnel soignant était étonné de son long réveil, de sa présence d’esprit mais aussi des regards, des échanges verbaux avec la famille, du soulagement, de l’apaisement chez certaines personnes de l’entourage d’Anaëlle.